Une question orale avec débat, relative à « l’insécurité grandissante en Côte d’Ivoire et au phénomène des enfants dits microbes », initiée par la députée Yasmina Ouégnin, a eu lieu le 5 juin 2018 à l’hémicycle.
Pour la députée de Cocody, les populations font face à « un regain d’insécurité, caractérisé par des braquages à main armée, les embuscades de type coupure de route, allant jusqu’au meurtre de passagers, des évasions massives de détenus, les mutineries à répétition, les sanglants conflits confiers interethniques, les disparitions d‘enfants, les attaques de symboles de l’Etat, le lynchage de corps habillés, l’attentat terroriste de mars 2016 ». dans cette même optique, selon Madame Yasmina Ouegnin, « dans l’agglomération d’Abidjan et, de plus en plus en plus, à l’intérieur du pays, les populations sont confrontées à un phénomène majeur de violence urbaine et juvénile, jamais observée auparavant dans notre pays ». Cette nouvelle race de criminels, constituée « de gamins, enfants et adolescents dont l’âge varie entre neuf et dix-sept ans, armés de couteaux, de machettes, de gourdins, de tessons de bouteilles, de grosses pierres, de marteaux,… s’attaque à tous, sans distinction, avec une atrocité et une violence inouïe, ont la particularité de blesser, de mutiler, voir tuer leurs victimes, avant de les détrousser », a martelé la députée de Cocody. Selon celle-ci, les causes de cette violence sont dues notamment à la « paupérisation et la promiscuité des quartiers d’où sont issus ces enfants, à la démission des parents, leur désir de ressembler à de faux modèles, le besoin d’appartenir à un gang et d’y acquérir des galons, la proximité avec des entrepreneurs de violences à la recherche d’un vivier comme les gnambros ».
Face à cette violence, les populations érigent dans les quartiers, selon l’initiatrice de cette question orale avec débats, des comités d‘auto défense et de sécurisation, et se rendent, malheureusement, justice parfois elles-mêmes. Fort de cela, Madame Yasmina Ouegnin a posé une série de questions directes à l’émissaire du gouvernement, M. Sidiki Diakité, par ailleurs, ministre de l’intérieur et de la sécurité :
- Quels sont les critères retenus par le gouvernement afin d’apprécier, d’évaluer et de déterminer le niveau de sécurité de notre pays ?
- Quelle est la capacité d’adaptation de notre appareil sécuritaire face à la progression de phénomène des microbes en termes géographique, démographique, et de mode opératoire ?
- Existe-il une base de données nationale fiable, intégrant diverses informations sur le profil de ces jeunes et susceptibles de participer à la mise en œuvre de stratégies d’endiguement de ce phénomène à moyen termes ? Sinon, comment s’opère le suivi de ces enfants ?
- Quel est à ce jour, le bilan du projet de resocialisation des mineurs en difficulté avec la loi ?
- En votre qualité de membre du comité interministériel renforcé, censé adresser cette problématique et dont la mise en place est à saluer, pouvez-vous nous dire quelles sont les limites et insuffisances de ce comité au regard des faibles résultats que nous déplorons tous ?
- Quelles vos propositions visant à éradiquer ce phénomène et à ramener la quiétude dans nos quartiers sur le long terme ?
Le ministre de l’intérieur et de la sécurité a indiqué que la Côte d’ivoire, au sortir de la crise majeure qu’elle a connue, le 11 avril 2011, avait un indice de sécurité très élevé. Celle-ci était en effet au niveau 4 de l’indice de sécurité des Nations Unies, sur une échelle de 6. Ce sont les efforts conjugués des autorités ivoiriennes, des Nations Unies, et les partenaires au développement qui ont permis d’améliorer au fil des années, la situation sécuritaire du pays jusqu’à ramener cet indice de sécurité à 1,18 en 2015. Cet indice va passer et se stabiliser à 1.5 en 2017, du fait de quelques piques d’insécurité liées à l’attaque terroriste de Grand – Bassam, aux mutinerie des soldats dans le mois de janvier 2017, aux attaques contre certaines positions et bases des forces de défense et de sécurité, dans la période de 2017. En dépit de cela cet indice, de sécurité est jugé par les nations unie de suffisamment satisfaisant. Pour preuve, le retrait de l’ONUCI de la Côte d’ivoire est un acte fort, qui symbolise le retour à la normalité, et est l’œuvre de la collaboration des partenaires au développement, de la mobilité opérationnelle des forces de sécurité, des opérations éperviers 1,2, 3 et de multiples opérations qui sont ciblés selon les périodes. Concernant les évasions des prisons, les dispositions ont été prises depuis la fin de l’année 2017, avec des équipes mixtes pour assurer la surveillance des prisons et mettre fin aux évasions. Pour ce qui concerne les microbes, selon le ministre, ils ont fait leur apparition dans notre société en avril 2011. Pour endiguer ce phénomène, il l’Etat a procédé à la sensibilisation des populations, à la dotation des commissariats d’un comité consultatif d’éthique par l’implication des religieux, des leaders sociaux, des jeunes, des étudiants, des élus... afin de les impliquer dans cette lutte. Par ailleurs, l’Etat a procédé à la mise en place de dispositifs spéciaux de répression, à savoir les différents opérations d’épervier, les opérations vacances et équités, les opérations éperviers ciblées sur les communes. Au plan stratégique, Un découpage des zones de compétences par commissariat a été mis en place et est dirigé par les officiers de police. Les résultats des différentes opérations menées de mai 2016 à mai 2018, par ces derniers, sont rassurants : Concernant la drogue, 830 fumoirs ont été détruits, saisis de quantités énormes d drogues 10475 armes blanches saisies, 569 « gnambolos » interpellés, donc 61 déférés. Pour les enfants de 16 à 18 ans, 3517 ont été interpellés dont 187 déférés.
En outre, Le gouvernement a mis en place un projet de resocialisation des enfants en conflit avec la loi, en septembres 2016 , prévu pour 1000 enfants. Ce sont pour l’heure, 774 enfants qui ont été pris en charge et repartis selon leur zone de provenance comme il suit : 384 enfants venus d’Abobo, 70 de Yopougon, 54 de Koumassi etc…. 110 de l’intérieur du pays, notamment de Gagnoa, Daloa, et de Bouaké. Ces enfants se sont retrouvés dans la sous-préfecture de M’bahiakro où ils ont été pris en charge. La durée de la prise en charge a été de 12 mois, dont 6 mois sur le site de resocialisation et 6 mois de suivi pour chaque bénéficiaire sur terrain. Ils ont été formés au civisme, à la citoyenneté, à la désintoxication, à l’apprentissage d’un métier tel que la menuiserie, la couture, la maçonnerie, sous la houlette d’éducateurs spécialisés constitués professeurs gendarmes et policiers. Sur les Sur les 774 enfants pris en charge, 500 ont été placés auprès des maitres artisans pur l’apprentissage d’un métier, 22 s’auto emploi, 18 vont à l’école, 15 sont placés à orphelinat de Bingerville, 24 sont incarcérés à la MACA, 17 n’ont pu être réinsérés à cause du refus de leurs parents pour diverses raisons, 164 ont abandonné la formation professionnelle dont 22 se sont évanouis dans la nature, 09 sont malades, 05 décès. Au total, 555 enfants ont pu être insérés. Selon le ministre, après le passage de ces enfants dans les centres de resocialisation, ces mineurs sont un modèle pour la société. 
Il faut noter que cette question orale avec débats, initiée par la députée Yasmina Ouegnin, a eu un intérêt certain auprès des députés, au vu de la qualité des débats qui a duré cinq heures.


 


CICAN